A ce titre, Rooney est un paradoxe vivant. Tandis que la plupart des joueurs de son rang voient leur équipe s’adapter à leur jeu, Shrek a choisi la voie inverse, en faisant évoluer son jeu en fonction de ses partenaires. “I have to change my style“, dit-il dans une interview sur le sujet. Plus que de style, c’est toute sa mentalité qui change sur le terrain selon sa position et le rôle qu’on exige de lui, dans une obéissance presque aveugle aux volontés du plan de jeu. Cette faculté d’adaptation est une chose rare dans le football moderne ; elle est aussi et surtout synonyme d’une acuité tactique sans précédent, faisant de Rooney l’un des joueurs les plus intelligents de la scène européenne.
C’est là la plus grande vertu du Britannique. Derrière ses allures pataudes, ses velléités salariales et ses errements capillaires, l’homme a su s’effacer au profit de ses partenaires et des choix parfois difficiles de son coach (à l’instar de sa non-titularisation lors dumatch retour contre Madrid cette saison).
C’est d’ailleurs peut-être son seul défaut : en se plaçant à ce point en retrait des nouveaux arrivants, Rooney en vient à minimiser son apport dans le jeu mancunien, et plus particulièrement sa reconstruction post-Ronaldo. Au point que certains supporters en viennent à ne pas craindre son départ…
Ce serait une erreur grossière, tant l’équipe est à l’orée de sa reconquête européenne. N’en déplaise aux hipsters hispano-germanophiles, Manchester United s’annonce peut-être plus fort que jamais, capitalisant sur l’expérience des anciens pour mettre les nouveaux dans les meilleures conditions possibles. La versatilité tactique de Rooney est précisément ce qui aura permis à Kagawa de trouver sa place dans l’équipe, à Van Persie d’exploiter l’étendue de son talent technique.